Ne voyez pas là le titre d’un vieux film pornographique allemand, mais bien la rencontre avec Mathieu Simoulin, qui travail en tant que photographe saisonnier. Durant l’été, Mathieu établi son bureau dans ce qui me semble être un endroit des plus magnifiques en France : Les gorges du Verdon. Bien qu’étant amis de longue date, il me semblait intéressant de partager avec vous son point de vue sur le métier de photographe, à la fois par ses choix et par sa volonté de vivre de sa passion.

– Comment t’es venu cette passion pour la photographie ?

La photo s’est présentée à moi un peu par hasard. J’étais à la faculté d’audiovisuel de Valenciennes dans le but de me former aux métiers du son. Dans les locaux de l’université, il y avait un labo photo… J’avais un vieux boîtier argentique Praktica MTL3 tout manuel qu’on m’avait offert quelques années avant, mais cette petite boite en métal avec ses molettes et ses chiffres obscures restait un mystère pour moi. Un ami de l’époque m’a alors initié aux techniques de l’argentique. Ça a été une vraie découverte pour moi et j’ai alors commencé à mettre en scène les copains. Je ne sortais pas des images terribles mais le moment de la prise de vue était toujours un régal. Des moments entre potes avec des idées qui fusent dans tous les sens et des fou rires en-veux-tu-en-voilà (souvent accompagnés d’une bonne vieille absinthe de chez nous, il faut bien le dire!).
S’en est suivi l’achat d’un reflex numérique et comme j’avais suivi des cours d’éclairage en fac, j’ai rapidement eu envie d’investir dans un petit kit de flashs… La qualité des images s’est améliorée au fur et à mesure et c ‘était parti !

– Qu’est ce qui t’as motivé à passer le cap d’amateur à professionnel ?

J’ai voulu me lancer en tant que pro après une longue période de chômage. J’avais enchaîné des petits CDD mais je sentais bien que je n’avais aucune motivation pour ce que je faisais. D’un autre côté, j’avais beaucoup de temps libre pour réaliser mes petites séries photo et progresser sur la technique.
Des amis qui habitent dans le Verdon et qui étaient dans le milieu du rafting m’ont alors expliqué qu’il y avait là bas un photographe qui shootait les touristes en bateau sur la rivière et que son business était sur le déclin. Comme j’étais déjà allé quelques fois en vacances dans la région et que j’en étais bien tombé amoureux (de la région, pas du photographe, hein!), il n’a pas fallu grand chose pour que mes amis que convainquent de monter mon auto-entreprise et venir tenter ma chance.
J’ai donc fais une saison-test en 2013 qui s’était plutôt pas mal passée mais je voyais bien qu’il me manquait pas mal de connaissances sur le métier. J’ai donc enchaîné sur une saison d’hiver en station de ski en travaillant en indépendant pour un studio. Ça a été plein d’enseignements pour moi. J’ai pu voir comment bossaient les bons filmeurs-photographes, j’ai comparé les différents fonctionnements des boîtes, et surtout je me suis désinhibé sur beaucoup de points.
Et me voilà donc à la fin de ma saison 2014 durant laquelle j’ai mis à profit le maximum des enseignements de l’année passée… et le bilan est très positif !

– Tu es depuis 2 ans pro grâce au statut d’auto entrepreneur, peux tu nous dire ce que cela t’apporte au quotidien ? Pour toi est-ce toujours un statut intéressant pour lancer son activité ?

Ça va maintenant faire un an et des brouettes que j’ai monté mon auto-entreprise. Le lancement a été plutôt facile en dehors du fait que les organismes qui s’occupent de nous aider pour la création d’entreprise (pôle emploi, CMA…) étaient mal renseignés sur la législation des métiers de la photo. Une bonne galère pour savoir comment me déclarer, ce que j’avais le droit de vendre ou pas, comment gérer un métier en itinérance…
Tout ça mis à part, je pense que ce statut est vraiment un plus pour se lancer sur les premières années, surtout si l’on bénéficie de l’ACCRE : Aide au Chômeur Créant ou Reprenant une Entreprise, qui consiste en une exonération partielle de charges sociales sur les premières années. Paperasse administrative relativement réduite, comptabilité simplifiée, charges en fonction du chiffre d’affaire (tu gagnes 0, tu payes 0), aides financières (quand on y a droit!), capacité de réaliser quasiment tout type de vente de photos…
En revanche, au bout de la troisième ou quatrième année, je crois qu’il faut très sérieusement envisagé le passage à d’autres statuts plus intéressants financièrement (si l’on y est pas déjà forcé en dépassant un certain chiffre d’affaire annuel).

– Le reportage touristique est une pratique encore peu connu, peux tu nous raconter une journée typique ?

Une journée typique de mes saisons d’été, ça ressemble à ça :
– 8h : réveil, 10 litres de café, préparation du matos et du casse-croûte pour la journée.
– 9h : 20-30min de route avec pétage de plomb sur les camping-cars, les motards, les batards (rime pauvre, j’avoue, en même temps allez faire de la poésie avec tous ces dangers publiques qu’on trouve sur les routes de montagne!)
– 9h30 : c’est parti pour une petite marche jusqu’au bureau. J’emprunte un bout d’une randonnée bien connue du Verdon avec ses escaliers et ses tunnels (balance les photos Julien!), et puis petite descente en « rappel » pour rejoindre ma petite plage au fond du grand Canyon. C’est la beauté !
– 10h -16h : prise de vue des clients de la randonnée aquatique du canyon (300 à 400 personnes qui sautent depuis un rocher de 3m).
– 16h30 : Haaa p*tain mais qu’est-ce qu’il fout au milieu de la route celui-là?!! Mais apprenez à conduire bande de ***** !!!
– 17h-18h : import et tri des photos de la journée.
– 18h-23h (en moyenne) : retouches, upload des photos sur le site web, réponses aux mails des clients, nettoyage du matériel et accessoirement petite pause pour manger.
Et ça se répète sur 2 mois avec les variantes « jours de raft » un peu moins chargées.

– Au delà de ton travail, tu as également exposé quelques séries de tes travaux personnels, qu’est ce que cela t’as apporté ? Si tu devais mettre une de tes photos en avant, quelle est celle que tu choisirais ?

Jusqu’ici j’ai réalisé 2 expositions de travaux personnels. C’est également une sacrée expérience, surtout quand tu as l’habitude de voir tes photos uniquement sur des écrans et que tu n’es pas un très grand communiquant sur Internet. Ça m’a permis d’avoir des retours directs sur ce que je produis, de mieux comprendre comment les gens perçoivent et interprètent mes photos, et également de me faire quelques contacts.
J’aurais du mal à te donner UNE image que je voudrais mettre en avant. La plupart de mes photos fonctionnent par série et j’ai du mal à les présenter séparément.
Du coup, après un cruel dilemme, je suis revenu à la première photo numérique dont j’ai pu être fier. Premiers pas en éclairage aux flashs et en effets spéciaux !

– Quel est ton conseil pour les photographes débutants ? 

Mon conseil pour les photographe débutants : ne pas se borner à un sujet ou un style. Le fait d’explorer et de tester te permet de trouver ce qui te branche vraiment et chaque nouveau sujet te fait progresser sur les autres. Après m’être borné aux portraits mis en scène, je me suis intéressé aux paysages, puis à la macro, puis à la photo de sport et au filmage. Et aujourd’hui quand je retourne à mes petites mises en scène, je sens un réel progrès et une aisance que je n’avais pas avant toutes ces expériences.

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Merci Mathieu d’avoir pris ces quelques lignes pour nous donner ton point de vue sur la photographie. Si vous souhaitez voir un peu plus du travail de Mathieu, vous pouvez vous rendre sur son site à l’adresse suivante : Blast Geek Photography